Je veux vous partager la réflexion de Nathalie Lallias de l'association les berceaux du ciel, parents en deuil située sur Combourg.
Un pavé dans la « maRRe du Bien Naître »
Mais pour qui se prend - t’ on …
Je dédie cette réflexion à mon mari Jean-Luc que j’ ai eu la chance de rencontrer voilà maintenant huit ans, que j’ aime et qui m’ aime passionnément, et qui a bien voulu partager ma vie, à mes cinq enfants dont mes deux anges Cassandra et Léopoldine qui se sont envolées dans leur berceau du ciel en 2005, à l’ enfant dit « à particularité » que nous espérons bientôt adopter, et à toutes celles et ceux de France et de Navarre pour qui j’ éprouve une profonde empathie et à qui je n’ en veux pas d’ avoir pensé que « c’ est mieux comme ça … »
Un cadre haut placé dans la hiérarchie, nouvellement recruté pour faire remonter les bénéfices de son entreprise de l’ industrie automobile, sort de celle- ci, et s' arrête pour interrompre l' employé, chargé de l' entretien des espaces verts, qui était en train de tailler un rosier ( anecdote vraie ) :
- « Bah ... qu' est-ce que vous faites ? Ca ne sert à rien, c' est inutile ( sous- entendu, ça demande trop d' attention, de temps et d’ argent ), il faut tout couper ! »
L' employé resta bouche-bée, le cadre continua son chemin jusqu' à sa voiture tout en ayant dit ces mots et en n' ayant cessé de marcher d' un pas pressé.
Mais pour qui se prend- t' on ?
Cette réflexion qui va suivre est, au nom de sa liberté d' expression, celle d' un être humain, une femme, une citoyenne, une épouse, une mère, qui a l' impression d' un monde qui ne tourne plus très rond, d' une société qui marche sur la tête, et qui se préoccupe de la société qu' elle va laisser à ses enfants ...
Il ne s' agit ni d' une condamnation ou d' une dénonciation de qui que ce soit ou de quoi que ce soit, encore moins d' un jugement ou d’ une apologie de telle ou telle attitude à prôner, il s' agit bien plutôt d' un S.O.S et d’ une invitation à la clairvoyance de l' humain à se recentrer avec lui-même et avec son environnement naturel qui tend de plus en plus à être délaissé au profit de valeurs mercantiles et vénales, à l' heure du clonage et du jeunisme ...
Il est une évidence certaine que l' Homme est avide de Savoir et l' acquisition de la Connaissance l' induit trop souvent à l' utiliser à mauvais escient : puisque je SAIS, il faut que j' en fasse forcément quelque chose ...
Or pourquoi parce que je connais les fondements et les mécanismes d' une science ou d' un système, faut-il que j' en cherche à maîtriser le processus naturel, voire à le modifier ou le stopper, si cela ne me « convient » pas ?
Mais pour qui se prend- t' on ?
Ai-je besoin de connaître tout sur tout au coeur même de ce qui prend Vie ?
L' Homme a visiblement pris le pouvoir sur la Vie en se substituant au rôle naturel de l' ordre des choses du Vivant, en créant la Vie et en en décidant sa fin. Ainsi va la vie ... il s' octroie le droit de vie ou de mort sur les siens.
Notre société occidentale, appelée populairement « société de consommation », est devenue matérialiste; les biens et les personnes sont interchangeables et substituables à souhait, parfois même sans état d' âme : les valeurs morales Amour, Entraide, Humilité, Respect, Tolérance et Vérité sont de plus en plus niées, voire même reniées, au motif d' une déculpabilisation généraliste sur la nécessité d' une évolution technologique de l' environnement de l' Homme, que recouvre le terme sacro-saint "PROGRES".
Progrès de qui, de quoi ... ?
Nombre de scientifiques arguent le fait que leurs connaissances justifient la volonté de progresser ( « la fin justifiant les moyens » paraît-il ) comme une nécessité fondamentale inscrite dans la marche inexorable du temps : « il faut vivre avec son temps » peut-on entendre parfois de la bouche de la Jeunesse rétorquant à la Vieillesse, mais aussi à celles et ceux qui, non pas refusent, mais CHOISISSENT de ne pas s' immiscer dans une société victimisée et victimisante, dans laquelle en effet il FAUT trouver une réponse à tout, une solution pour tout.
Mais pour qui se prend- t' on ?
Cette quête éperdue du pseudo « progrès » moderne ouvre la voie à des dérives qui touchent de près à l' éthique, au caractère sacré de la vie et donc de la Mort.
Et si jusqu' à la Mort, on accompagnait la Vie? Serait- ce un voeu pieux ?
Force est de constater que l' on ne l' accompagne plus la Vie, car notre préoccupation est plutôt celle de dominer sa Fin, de la prolonger coûte que coûte en la maîtrisant et en la décidant, c' est ça la Mort aujourd' hui ...
Tabou, effrayante, qui rend forcément triste, tellement innommable dans l' acceptation inéluctable de son sens, qu' on la nargue, voire même ridiculise sous toutes ses formes, comme le démontre la fête quasi « institutionnelle » et « normalisée » d' Halloween avec ses déguisements d' épouvante ( fantômes, mort-vivants, revenants ...) qui la fait intégrer dans l' inconscient collectif des enfants comme quelque chose de « vilain » ... oui c' est ça la mort aux yeux des enfants ( et dans leur tête ) aujourd' hui ...
Mais pour qui se prend-t' on ?
La « M » ort se personnifie à présent, elle apparaît « irrespectueuse », dérangeante ( elle arrive toujours au mauvais moment, elle ne prévient pas elle ) et repoussante parce que impensable, insoutenable croit-on ... alors on la devance en la provoquant parfois au début, parfois au milieu, très souvent à la fin d' une vie, et parfois même avant de naître.
Oui, mourir avant de « n' être » n' est pas dans la logique de la vie, ça arrive quand la Nature s' en charge, mais aussi quand l' Homme le décide ... on assiste à une nouvelle conception du « Bien Naître » dans notre société.
L' Homme a oublié d' être mortel dans son mode de vie moderne, il ne sait plus faire face à l' ordre naturel de la Vie qui le rattrape tôt ou tard, et qui lui fait assimiler la Mort à quelque chose d' inconcevable par principe, c' est un état de fait : mourir n' est plus acceptable en cette civilisation, la Mort n' est plus naturelle dans son concept ( en tout cas perçue comme telle ), elle est devenue « technicisée ».
L' Homme a oublié ses capacités de survivance et d' affrontement du réel ( la preuve, il exprime son besoin de déléguer cette tâche à quelqu' un qu' il rémunère pour faire ce travail à sa place, il a créé un besoin qui en est révélateur : il a besoin de « coach » dans tous les domaines de la vie ), plutôt que d' apprendre à vivre comme nous l' impose notre société de consommation en « brûlant » sa vie parfois parce-que l' on a peur de la Mort ; et si on apprenait pour « changer » enfin, à Mourir en vivant vraiment selon les règles fondamentales du Bonheur qui nous éloigneraient ainsi du sentiment permanent de frustration et d' insatisfaction :
- libérer son coeur de la haine,
- libérer sa tête des soucis,
- vivre simplement,
- donner plus,
- s' attendre à moins.
En clair, et si enfin on se prenait pour qui nous sommes vraiment, ESSENTIELLEMENT ?
Aujourd' hui, l' Homme usurpe la Nature, s' octroie un droit sur la Vie ou la Mort du foetus à travers une logique d' eugénisme pragmatique que revêt le terme « IMG » ( Interruption Médicale de Grossesse).
Si l' on se penche sur la définition du terme « eugénique », dans Wikipédia on peut lire « ensemble des méthodes et pratiques visant à transformer le patrimoine génétique de l' espèce humaine dans le but de le faire tendre vers un idéal déterminé »; ainsi l' eugénisme se retrouve dans les « progrès » du « génie » génétique, la Procréation Médicalement Assistée, le diagnostic prénatal et préimplantatoire ...
« Interrompre Médicalement sa Grossesse » répond en ce sens à l' intérêt immédiat de la collectivité à ne pas se sentir capable de supporter des êtres « déficients » ; en effet ceux- ci apparaissent coûteux en soins et en attention constants.
Le but ultime du métier de gynécologue-obstétricien n' est- il pas la Vie ?
De nos jours, le médecin gynécologue-obstétricien est devenu un technicien dont la société lui intime le devoir de décider si l' intérêt probable du fœtus destiné à une vie impossible, est de ne pas vivre.
Mais pour qui se prend-t' on ?
Interrompre la vie d' un être vivant avant même de lui avoir donné une chance de naître, parce-que la société, les médecins, et les parents à qui on laisse le choix final, l' ont décrété comme étant « cela sera mieux ainsi pour lui » ?
Mourir avant de « n' être » du fait de la main de l' Homme est-il devenu à ce point la Norme qu' il n' est plus laissé à la Nature le soin d' opérer par elle-même, en temps et en lieu, l' élimination naturelle des fœtus dont, de toute façon, la vie sera impossible en dehors du ventre maternel, une fois né !
Le double problème, ou plutôt le dilemme, voire même le paradoxe de l' Homme moderne, autant il décide d' abréger la vie à son bon vouloir, autant il décide de la maintenir et de la prolonger autant que possible avec l' arsenal thérapeutique qu' il a développé ( appareils de réanimation ... ) en ôtant aussi, encore là, la possibilité à la Nature de faire son œuvre ; ce qui conduit, du fait d' une Médecine de plus en plus technicisée, à des maintiens en vie douloureux pour les patients, et à un supplice moral pour les familles, comme l' a révélé le cas de Vincent Humbert et de sa mère courage qui a dû affronter la Justice de l' Homme pour représenter la volonté de son fils ( « emmuré dans son corps » ) à faire valoir son droit de mourir naturellement, normalement.
Ainsi, il en va de la Vie : du fait des progrès de la médecine, parée de bonnes intentions et de par sa technologie, l' Homme se fait mal, du Mal, en croyant vouloir faire du bien, le Bien, dans l' intérêt général ; c' est pourquoi le problème de l' euthanasie n' a jamais été autant un problème justement autant abordé : pourquoi essayer de vouloir légiférer sur un mot qui ne devrait même pas exister dans le dictionnaire ... si on laissait la Nature se charger de notre fin de vie ?
L' Homme désormais, dans notre société, souffre PLUS longtemps et PLUS tard, à défaut d' avoir souffert MOINS en mourant PLUS tôt, c' est à dire NATURELLEMENT.
D' un côté, l' Homme a donc le droit de Vie ou de Mort sur les siens : il retire la Vie, le droit de vivre, à un être qui n' est pas encore né ; d' un autre côté, il refuse la Mort, la possibilité naturelle de mourir au motif d' une Médecine audacieuse dont la présomption est de penser que parce-qu' elle en a les moyens, sa fonction est de sauver coûte que coûte au risque de prolonger inutilement des douleurs insupportables.
Dans cette mesure, si on ne prolongeait pas démesurément « artificiellement » la vie des êtres humains, ces associations qui militent à juste titre contre l' acharnement thérapeutique et pour « le droit de mourir dans la dignité », n' auraient pas le mérite d' exister ( à l' heure d' aujourd' hui en si grand nombre ) si l' Homme n' avait pas oublié sa nécessaire humilité face à la Nature, s' il n' avait pas oublié d' où il vient ... sa condition biologique de mortel, et que toute Vie a un début et une fin ...
Cela note bien le paradoxe d' une Médecine qui s' est perdue en chemin en occultant le principe de « l' ordre naturel des choses » ; Thomas Hobbes n' a-t' il pas dit que « l' Homme est un loup pour l' Homme »?
Grand nombre de médecins, assujettis à la toute puissance de notre Justice humaine, préfèrent « ne prendre aucun risque » et recommandent une IMG comme un SMS ... ( nouveau mot inventé d' un nouveau langage moderne inventé lui- même d' une Médecine qui s' invente de plus en plus ) simplement en cas de doute et non seulement en cas de certitude. Nous assistons bien là, à l' instrumentalisation de la Médecine qui pense ne pas avoir d' autre choix que de répondre à une demande de résultats ... mais au fait, n' a- t' elle pas bien plutôt une obligation de moyens comme le stipule Hippocrate, auquel tout médecin prête serment et auquel il jure se conformer ?
Désormais en effet, les parents peuvent porter plainte et demander « réparation des préjudices subis » contre le médecin qui a pratiqué l' échographie obstétricale, au motif qu' il n' a pas ( pu ou su) diagnostiqué le handicap, comme le permet l' arrêt Perruche.
Le handicap est- il à ce point si laid ? Laid pour qui ? La personne handicapée ? Les parents ? La société ?
Il faut comme même bien se rendre compte que le mythe de l' enfant idéal est bien présent dans l' inconscient collectif : nombre de parents souhaitent recourir à l' intervention de la Médecine, c' est à dire à une Interruption Médicale de Grossesse, pour le simple diagnostic d' une fente labiale appelée plus communément et ridiculeusement « bec-de-lièvre » !
Alors que cela s' opère très facilement de nos jours ... fort heureusement ( j' ose l' espérer ) que les médecins savent dire « NON » ...
On peut donc dans cette perspective se poser la question sous-jacente et légitime de l' acte d' Amour sensé engendrer le fruit de cet Amour ...
N' y a-t' il donc plus tout à coup d' Amour, tout l’ Amour ( de départ ), et rien que de l’ Amour dans ce fruit « imparfait » ? La Raison a pris le dessus, Blaise Pascal n’ avait-t’ il pas dit d’ ailleurs à ce propos que « le cœur a ses raisons que la Raison ignore » ? On assiste ainsi à une rationalisation de l’ acte le plus naturel qui nous soit donné par la Nature, « donner la vie », sous garantie de sa conformité : « un bébé NF est demandé, un bébé NF vous aurez ( sinon le Service Après Vente de la Médecine, en cas d’ erreur ou d’ omission, vous dédommagera … et oui là, dans les affaires de la Nature, on ne badine pas, il n’ y a pas de remboursement ou d’ échange possible sous réserve que vous ayez gardé votre ticket de caisse, ni de proposition de remplacement du « produit ou objet défectueux » par un « produit/objet » de substitution qui, lui, a les bonnes fonctions, ou encore de retour possible à l’ envoyeur pour « vice- caché » ( comme on peut le faire avec les animaux adoptés à la SPA » ). Et oui … sauf que là, on parle bien de « sujet » et non d’ « objet », et c’ est bien dommageable à l’ Homme qui n’ avait pas prévu cet aléa de sa condition.
Aujourd’ hui, on n’ « accouche plus sous X » mais on « accouche sous le secret » d’ un poids implicitement trop lourd à porter soi-même ( mais dont la loi permet désormais tout de même à l’ enfant d’ avoir accès à ses origines tellement il a été constaté de souffrances morales par ces jeunes … ) ; aujourd’ hui on n’ « abandonne plus » un enfant, on dit qu’ « on le confie à l’ adoption » … tellement de formules déculpabilisantes qui ne changent pas le problème de fond : « celui de refiler le bébé et l’ eau du bain qui va avec … » pourraient dire certains de manière blessante et brutale ; certains parents préfèrent confier à l’ adoption leur enfant qui est né avec des « anomalies », des « vice-de-formes », c’ est à dire qui ne correspondait pas à l’ idée qu’ ils se faisaient d’ un enfant, de leur enfant … cet enfant trop lourd à regarder, trop lourd à s’ occuper, trop lourd à supporter, trop lourd à tolérer.
Et si « on ne savait pas » comme autrefois ? Et si l' échographie fœtale n' existait pas ? On laisserait ainsi venir au monde ce petit être, le fruit de notre Amour, avec toutes les chances de vivre ou de mourir que lui laissera la Nature, au lieu de décider pour lui- même …
Ainsi s' opère aujourd' hui dramatiquement une sélection des enfants à naître, l' IMG étant devenue une méthode d' élimination des foetus « malformés » ( y compris de ceux dont on a un doute ), autrement dit non conformes à l' idée que se fait la société de ce que doit être la Vie d' un être humain.
Le terme « Médicale » de l' expression « Interruption Médicale de Grossesse »semble déculpabiliser la Médecine et/ou les parents qui estiment avoir fait le « bon » choix, le « meilleur » choix pour l’ enfant.
Mais quel choix ? Le choix d' avoir choisi la Mort plutôt que la Vie pour le « bien » de son enfant ou pour le nôtre ? Pour la charge qu' il n' aura pas à faire peser sur la vie de ses parents qui entraînerait inévitablement frustrations et privations : argent, liberté, loisirs, travail, ou encore le regard d' autrui posé sur son enfant ... mais aussi la charge, coûteuse, qu' il n' aura pas à imposer à la société ?
Mais pour qui se prend-t' on ?
Se donner bonne conscience est si déculpabilisant et si humain, si rassurant pour soi, et si justifiant devant l' Autre : « cela n' aurait pas été une Vie pour lui, c' était mieux comme ça ».
« Cela n' aurait pas été une vie pour nous aussi » s' abstient-on de dire par peur d' un jugement taxé d' égoïsme, « c' est mieux aussi pour nous » devrait- on dire pour la maîtrise de notre Vie et la poursuite de nos projets ... Rien ne doit entraver « le long fleuve tranquille » de notre vie de famille et de couple dont on a savamment dressé longtemps à l’ avance les plans dans un « programme de vie » ( conditionné dans un idéal sociétal de bonheur le plus « parfait » possible ) pourrait-on lire entre les lignes du consentement éclairé que signent les parents donnant leur accord pour recourir à une IMG. Et dire que l’ on peut recourir à une IMG quelque soit le terme de la grossesse ( 3, 6…9 mois même ) alors que le délai légal pour recourir au droit à l’ IVG est de 14 semaines, où est le SENS ?
Et se pose-t’ on la question de savoir ce que peut sentir et ressentir ce petit être que l’ on ne souhaite plus dans son ventre maternel, parce qu’ il n’ est pas « normal », quand le médicament que l’ on va injecter à sa mère va lui donner la mort progressivement jusqu’ à son dernier souffle de vie … là je pleure, et ne peux m’ empêcher d’ éprouver de la compassion pour ces parents dans le désarroi, qui ne se sont pas laissés toucher par le choix de l’ alliance de la Vie et de l’ Amour, qui ne se sont pas sentis capables de faire face au handicap perçu comme une « erreur de la Nature ».
L’ image de « l’ enfant rêvé » s’ est envolée avec leurs certitudes, venant ainsi troubler un cadre de vie qu’ ils croyaient bien établi et conforme à leurs aspirations les plus profondes.
L’ enfant tant espéré lors d’ une prochaine grossesse, que l’ on attend parfait cette fois-ci, ne remplace bien sûr pas l’ enfant que l’ on n’ a pas voulu « imparfait », mais constitue un palliatif à notre conscience, agit comme un baume voire un pansement qui n’ enlève en rien, il est évident, à la douleur morale des parents qui vivent une IMG pour la grande majorité comme un deuil, comme un « vrai » deuil …
Mais au fait, ne porte-t’ on pas logiquement le deuil de quelqu’ un dont on n’ a pas souhaité la mort au contraire ?
Vivre, c’est prendre des risques, se marier, c’ est prendre un risque ( ce n’ est pas toujours pour le « meilleur », et c’ est d’ ailleurs dans les épreuves malheureuses que s’ éprouve la solidité d’ un couple ) de parfois être confronté à un accident qui ôte la vie à votre conjoint … ou qui lui retire l’ usage de certains membres qui en font une personne « handicapée » … vais- je pour autant me séparer de mon mari ( quoique … nombres de couples choisissent de divorcer, une façon d’ éluder le problème, un échappatoire, un refuge illusoire vers un ailleurs « meilleur » croit- on … ) comme peut me permettre la médecine par l’ IMG de l’ enfant que je porte qui « ne me convient pas » ?
Faire des enfants comporte un risque, tout comme celui de vivre ; vivre, c’ est parfois devoir faire des choix qui remettent en cause une « qualité de vie », choisir c’ est renoncer de toute façon ; ce concept du renoncement dans notre société occidentale n’ est pas admissible, il en va pour preuve tout ce qui touche de près ou de loin à la médecine esthétique : dès que je perçois ce qui m’ apparaît comme une imperfection, un « défaut », je veux le supprimer comme je joue de la zappette sur ma télévision, mon ordinateur ou mon mobile. « zapper » ce qui gêne est devenu un véritable code de vie, une philosophie de vie où le spectre de l’ apparence physique, de la « perfection » et de l’ éternelle jeunesse règne en maître sur nos consciences asservies par la consommation et le matérialisme :
je suis identifié à ce que je possède ( et non à ce que je suis intrinsèquement, intellectuellement, de par mes qualités morales ), au « côté visible de l’ iceberg » qui extrapole mon être dans ce que j’ ai, et non dans ce que je suis.
On assiste ainsi à une démocratisation voire à une politisation du culte du corps ( c’ est devenu quasi politiquement correct de « soigner » son apparence ), une surenchère du Beau illimitée, clownesque, où toute imperfection a l’ air irrévérencieuse, immorale ; alors il faut la camoufler, la dissimuler autant que possible par respect pour l’ Autre qui me côtoie, encore mieux la cacher parce que l’ on nous dit que « c’ est pas beau » …
Encore une fois, il ne s’ agit pas ici d’ une condamnation ( je ne juge pas, je donne mon avis et c’ est bien différent ), encore moins d’ une dénonciation des parents qui ont recours à une IMG, dont je ne minimise pas ou sous-estime pas la douleur de la perte de leur enfant ; il est soulevé simplement le fait que ( tout est fait dans notre société qui n’ a plus le temps de se poser les bonnes questions ) le fantasme de l’ enfant parfait rôde partout autour de nous, notamment dans la publicité.
Mais pour qui se prend-t’ on ?
« Retoucher » le visage d’ un enfant pour le profit qu’ il peut générer … dès son plus jeune âge, l’ être humain doit être « rentable », il doit pouvoir rentabiliser, apporter sa contribution sociale ; pour cela il doit apparaître BEAU, conforme … que dis-je … plus que beau … idéalisé par la sublimation de son apparence physique. Il passe ainsi de « sujet » à « objet » de convoitise par et pour la société ; et « objet » d’ idolâtrie égocentrique pour nombre de parents : « regardez comme il est beau … et bien c’ est mon enfant là sur la photo ! ». L’ enfant apparaît comme le prolongement sublimateur des parents qui n’ ont pas réussi aussi idéalement leur propre vie.
On assiste à une véritable maîtrise totale du corps de la femme, devenu un « objet » d’ investigation médicale, scientifique, un produit de la « reproduction » : la reproduction est devenue progressivement « production » ; tel semble être le leitmotiv de notre société moderne ; jusqu’ au cœur même de ce qui prend vie, on croit devoir comme dans l’ industrie, « produire » des êtres dont on cherche à maîtriser la venue ( les circonstances et le moment ) et qui doivent être rentables, c’ est à dire conformes, « non déficients », « normaux ».
Mais pour qui se prend-t’ on ?
De nos jours, il y a une banalisation de l’ IMG et de l’ IVG depuis 1975, date de son autorisation ; la tolérance accordée par la loi Veil pour l’ Interruption Médicale de Grossesse semble devenue un véritable droit à l’ avortement. Des milliers d’ IVG sont pratiquées en France chaque année, et le nombre ne cesse de croître chaque année en dépit des nombreux moyens de contraception.
Il y a environ un avortement pour trois naissances ; chaque femme connaîtrait en moyenne dans sa vie une grossesse « accidentelle » et une fois sur deux, elle déciderait d’ y mettre fin.
Dès lors, le Triple Test, simple prise de sang qui permet très précocement le dépistage d’ éventuelles anomalies du fœtus par les marqueurs sériques maternels, est proposé systématiquement aux femmes enceintes.
Dans le journal « La Croix » du 27/04/2000, Israël Nisand, chef d’ un service de Gynécologie-Obstétrique à Strasbourg relatait déjà des chiffres « inquiétants » :
550 000 femmes enceintes sur 750 000 en 2000 auraient « bénéficié » de ce Triple test, et pour 10% de ces femmes, il y avait un « risque » accru de Trisomie et auraient ainsi fait un diagnostic prénatal par amniocentèse, soit 55 000 femmes. Cet examen entraînant la mort du fœtus dans 1 à 2% des cas, on aurait ainsi provoqué au minimum 550 fausses couches alors qu’ il n’ a été décelé « seulement » environ que 280 trisomies ! On aurait donc avorté 2 fœtus sains pour 1 fœtus trisomique.
En France, une centaine de millions d’ euros environ sont consacrés chaque année par les pouvoirs publics au dépistage prénatal de la trisomie 21, alors qu’ aucune politique majeure de recherche publique finance la recherche médicale sur la trisomie 21. On aurait presque envie d’ en rire … d’ un tel paradoxe … où est la logique ?
Mais pour qui se prend-t’ on … pour dépenser autant sur la ( mise à ) mort potentielle de l’ Humain en cas de malformation et de déficience, et aussi peu, voire rien, sur la prise en charge de ces êtres ( qui ont eu la « chance » ou la « malchance » diraient certains, d’ être épargnés et arrivés en vie ) qui ont besoin de nous pour pouvoir continuer à vivre le mieux possible ?
Entorse à mon bien-être, et contraire à l’ idée que je me fais du « Bien Naître », l’ enfant imparfait vient bousculer mon programme de vie ; l’ IMG s’ incarnant comme un procédé inventé par l’ Homme pour répondre à son exigence narcissique de toute puissance et de domination sur la Nature, la Vie et la Mort. Légale et protocolaire, l’ IMG déculpabilise tout le monde, la société, le corps médical et les parents ; la culture de mort est ainsi mise en exergue plutôt que celle de la Vie.
L’ IMG est proposée comme une « solution » … Conseillée, recommandée … les parents sont aidés et « orientés » dans un choix à faire, une décision à prendre, mais l’ interruption de grossesse n’ est jamais bien entendu imposée.
Par sa légalisation et sa proposition, on assiste ainsi à un cautionnement sociétal de tout un chacun, agissant en parfaite « bande organisée » de la perfection de la race humaine.
Tous ces enfants que l’ on peut voir au Téléthon n’ expriment-ils pas leur bonheur de vivre aux côtés de leurs parents, même si pour certains, ils savent qu’ ils auront une vie plus courte que le commun des mortels ? La Vie ne prend -t’ elle pas tout à coup son sens réel, avec de vraies valeurs profondément ancrées dans l’ Amour qui les unit à leurs parents ? Est-ce que ces mêmes parents regrettent la venue au monde de leur enfant ? Très sincèrement, je ne le pense pas …
Grégory Lemarchal, illustre gagnant de la Star Academy à la « voix d’ ange » ( qui a réussi à concrétiser son rêve de la chanson et à toucher bien des cœurs dans le monde ),et ses parents, n’ ont-ils pas eu le bonheur de se connaître et de partager des moments de vie merveilleusement riches, même si atteint de la mucoviscidose, il a dû partir trop tôt ?
Tout enfant a le droit à la vie ; le nier et le refuser, c’ est « tuer » un bonheur, un sourire, un talent de cet enfant … quelque soit sa condition physique, les circonstances et la durée de vie qu’ on lui présage. Se priver dans sa propre vie, de la vie d’ un petit être qui grandit en vous, est une hérésie profonde, c’ est se fourvoyer sur le sens même de la « VIE » ; cela nous rattrapera un jour, la Nature ayant horreur du vide, elle reprendra ses droits à la vie.
Ma première fille Cassandra est décédée naturellement le jour de sa naissance, quinze jours après mon mariage, au terme de cinq mois et demi de grossesse ; la Nature ne lui a pas laissé le choix et le corps médical non plus d’ ailleurs ( et c’ était très bien comme ça ) puisqu’ elle « ne rentrait pas dans les critères de réanimation ».
Ma seconde fille Léopoldine est née aussi trop tôt au terme de six mois et demi de grossesse, elle, elle rentrait dans les critères de réanimation et a donc dû supporter un long, douloureux et vain combat dans un service de réa-pédiatrique, mais elle a décidé de s’ envoler le lendemain de Noël au bout d’ un mois de « vie ». J’ ai eu le sentiment de la perdre deux fois : une fois quand elle est née, puis quand elle est finalement partie d’ elle-même dans nos bras, atteinte d’ une leucomalacie périventriculaire kystique bilatérale étendue. La médecine tout aussi performante qu’ elle est, m’ a donné de doux espoirs, illusoires, ( même si elle arrive à « sauver » beaucoup de bébés ) qui n’ étaient que dérisoires à côté de l’ œuvre de la Nature. Elle n’ aurait pas eu à souffrir pour rien si la médecine l’ avait laissée partir naturellement comme sa sœur à sa naissance.
Même si en l’ espace d’ une demi seconde, j’ ai souhaité une fois la voir partir et nous « alléger » ainsi la Vie, j’ aurais donné tout ce que j’ avais pour avoir nos filles à nos côtés même si ce n’ était que pour quelques années, connaître le bonheur simple d’ un bisou sur la joue chaque matin à leur réveil … qu’ elles aient été « normales » ou « handicapées » …
La Vie a un début et une fin, tout le reste, c’ est ce que vous en faites par le sens que vous lui donnez … D’ emblée, sont sapées les chances d’ un enfant à naître de prouver ses futures capacités si celui-ci s’ avère être déficient et « non recevable » dans une vie physique réelle, et donc dans le cœur de ses géniteurs que l’ on appelle communément « parents ». L’ IMG vient alors solutionner le « problème » des parents face au concept du Handicap en le supprimant, en la personne de leur enfant. Je veux dire par là que quiconque ose penser que la vie n’ a de « prix » que si vous venez au monde « conforme » à une norme, à la norme, se fourvoie lourdement sur le sens qui nous est donné par la Nature de VIVRE tout simplement :
chaque être vivant a le droit à venir au monde naturellement, et réciproquement de choisir de mourir naturellement. Tout être humain a des potentialités que la Raison n’ a que faire : quel gâchis insoupçonné cela aurait été de se priver de la connaissance d’ une excellente comédienne comme Mimie Mathy ou de l’ excellente prestation d’ acteur dans le film « le 8e jour » de Pascal Duquesne ( atteint du syndrome de Down, appelé aussi Trisomie 21 ).
Mais pour qui se prend-t’ on ?
Mais pour qui se prend-t’ on pour concevoir la Vie, non pas dans son principe biologique, mais dans sa qualité et sa quantification ? Je n’ ai le droit à ma venue au monde que si je suis « normal », et une non-gêne pour ceux qui m’ ont procréé ?
Je ne devrais également avoir le droit de vivre qu’ à la mesure estimée et potentielle d’ une durée de vie « normale », conforme à celle du commun des mortels ? N’ ai-je pas le droit de ne vivre que quelques années seulement ? La qualité de vie ne se résumerait-elle dans notre société qu’ à la contribution effective, du fait d’ être « bien né », que je peux générer dans la société ? Le Bien- être serait donc l’ apanage du bien vivre avec deux bras, deux jambes, … bref un corps bien fait et une tête bien pleine ( « un esprit sain dans un corps sain » !!!!! ) ; en clair tout ce qu’ il faut là où il faut, pour produire bien sûr, mais aussi pour rentabiliser le fait d’ être né, donnant le change en contrepartie de ma naissance par une utilité sociale : je dois en effet aujourd’ hui « Bien Naître » pour pouvoir connaître semble-t’ il le « Bien Etre » … en tout cas, c’ est ce que supposent à ma place mes parents et la société, quand ils légitimisent l’ IMG comme une solution éradicative de ce qu’ ils croient être le malheur : « non, ce ne serait pas une vie pour moi » …
« Un esprit sain dans un corps sain », quelle fourberie de croire que les deux vont de pair ; la société ne nous en montre-t’ elle pas des contre-exemples magnifiques de certaines personnes névrosées sur un plan psychologique, et corporellement excellentes sur le plan physique ( athlètes de haut niveau … ) ; et inversement, de certaines personnes prolifiques sur le plan intellectuel et physiquement dépendantes ( écrivains, poètes, … ). Bizarre … eux semblent en apparence moins gêner la société de leur existence par la réciprocité substantielle qu’ ils apportent du fait de leur implication dans la sphère publique ; du coup ces personnes connues et reconnues sembleraient moins « entacher » l’ image de l’ être humain dans sa conceptualisation, dès l’ instant qu’ elles génèreraient un talent particulier mis au grand jour. Ce qui veut bien dire par là que le fœtus diagnostiqué « malformé » dont on a interrompu la vie, a répondu à l’ exigence de la toute puissance narcissique de ses parents en proie à la recherche de l’ Excellence … et s’ il avait été dit à ces mêmes parents que leur bébé, quoique « malformé » qui est en train de grandir dans le ventre maternel, allait devenir un être d’ excellence, avec un don, un talent particulier dont la société a besoin de bénéficier, et que cette reconnaissance sociétale allait le propulser sur le devant de la scène médiatique …ces mêmes parents auraient-ils vraiment décidé de recourir à une IMG sur leur enfant ?
La réponse semble claire … cette exigence narcissique de l’ excellence, de la reconnaissance, est corrélative de l’ égo, d’ un Surmoi de plus en plus surdimensionné : l’ enfant, plus qu’ un prolongement de notre propre chair et de notre propre patrimoine génétique, devient désormais de plus en plus un étendard, le porte-drapeau d’ un idéal parental inassouvi, en quête d’ une perfectibilité démesurée : « je souhaite que mon enfant fasse de hautes études, qu’ il réussisse DANS la vie … » peut-on entendre ici ou là ouvertement ou tacitement. C’ est pourquoi d’ ailleurs l’ enfant, dès son plus jeune âge, dans notre société, a un agenda de ministre ! Il n’ a en effet plus le temps de rêver, de s’ ennuyer …
On parle de « réussir DANS la vie » conformément à un ordre préétabli et normatif relié au concept d’ argent ( source a priori d’ un bonheur ouvrant la voie à une dimensionnalité et à une multiplicité de biens et d’ expériences acquis ), mais on ne parle pratiquement pas de « réussir SA vie » ?! L’ avènement de « l’ être- soi » en première intention nécessaire dans la construction de l’ enfant, qu’ il doit chercher par lui- même, est usurpé par « mon fils tu seras … » le résultat de mes aspirations, le produit inassouvi de mes rêves envolés jadis … dès lors s’ abat une très lourde charge sociétale sur l’ enfant à naître qui doit répondre, même pas encore né, au besoin qu’ a les parents de se voir dans cet enfant à venir comme le prolongement envié et enviable de leur « production » aux yeux du monde : il doit être un miroir … mais que voir dans « mon » miroir déformé par « mon » enfant imparfait ? Que va dire et penser toute la face du monde ?
Le Professeur Nisand constatait en Septembre 2002, lors d’ un débat autour des conséquences de l’ arrêt Perruche au Conseil de l’ ordre des médecins, qu’ en 2000, les 3 demandes d’ IMG concernant des « absences de doigt » ont été toutes refusées, alors qu’ un an plus tard en 2001, sur 3 demandes similaires, 2 ont été acceptées. La course inexorable après l’ enfant parfait est lancée …
Je n’ ose imaginer les chiffres aujourd’ hui 10 ans plus tard … j’ ai peur de les connaître et de découvrir cette grande comédie humaine, l’ ampleur de l’ incommensurable délire eugéniste de l’ Homme « moderne » …
Mais pour qui se prend-t’ on ?
Comment expliquer à un enfant que, tout à coup, le bébé que maman porte dans son ventre, n’ est plus ? Que sa maman et son papa ont choisi de faire mourir, avec l’ aide d’ un docteur, dans le ventre de maman, son petit frère ou sa petite sœur ? Parce qu’ il n’ était pas « normal » … ? Est- ce l’ explication que l’ on donnera à cet enfant ?
Bien sûr que non, on ne lui répondra pas par une telle brutale réalité diraient les psychologues, sous- entendant que l’ enfant comprendra plus tard vers l’ âge adulte quand il aura acquis une certaine maturité … quelle maturité ? Celle qui va lui permettre de comprendre que sa mère et son père lui ont menti, que sa mère et son père ont préféré la mort à la vie de ce petit frère ou de cette petite sœur dont on l’ a privé de sa connaissance, parce-qu’ il n’ était pas « normal », que sa mère et son père ont eu ce « permis de tuer » délivré par la Médecine et légitimé par la Loi ?
Que puis-je alors penser de l’ Amour que mes parents prétendent me vouer, dès lors qu’ ils ont été capables de commettre un tel acte à l’ encontre de mon petit frère ou de ma petite sœur ? Comment ne pas mettre en doute cet Amour, certainement si vrai mais si fragile aussi ?
Je serais également en droit de me demander ce qu’ il peut advenir de moi au fil des années ( leur petit enfant qui grandit a priori normalement ) si jamais je venais à être handicapé un jour ? Auraient-ils aussi là la volonté de me « supprimer » comme ils l’ ont fait pour ce petit frère ou cette petite sœur dont ils ne m’ ont pas laissé faire la connaissance ?
Donc nous serions à l’ abri du despotisme maternel ( et paternel … quoique le père « n’ a pas son mot à dire » dans le choix au recours à une IMG ) en dehors du ventre maternel, une fois né ! C’ est quelque peu contradictoire, car je pensais qu’ une maman avait cet instinct de « protéger » le petit qu’ elle porte …
Apprenant cela, comment ne pas développer un malaise existentiel, de vivre alors dans l’ angoisse permanente de ne devoir mon droit d’ être en vie ( droit à la vie ) qu’ à la condition de représenter, aux yeux de mes parents, la justification de mon « Bien Naître » jadis ? Dure réalité de ma condition, de mon statut et d’ un sort dont finalement je peine à comprendre la réalité actuelle … dois-je leur être reconnaissant de m’ avoir donné la vie au motif de ma « conformité », de ma « normalité » ? Moi, leur enfant, un produit de leur production, conforme à l’ idée a priori qu’ ils se faisaient de moi lors de ma conception, me sent bouleversé, perdu et plus très sûr, à cette annonce terrible : « mon petit frère ou ma petite sœur n’ « est » plus, ça j’ en suis sûr ! »
Ne pas m’ en avoir parlé, parce que jugé trop petit pour comprendre ? Comprendre quoi, ce choix de la mort plutôt que la vie ? Et eux, qu’ ont-ils compris dans cette histoire de leur choix ? Bien qu’ adultes eux, ne suis-je pas en droit de me poser la question de leur immaturité face à l’ anormalité, à l’ anticonformité, à la complexité, au handicapé que j’ aurais pu être ( mais que je ne suis pas par chance pour eux et pour moi ) dont la logique et le sort implacables auraient été de me faire mourir avant de naître ?
L’ Homme « moderne » a-t’ il à ce point perdu son instinct de conservation, de survivance, cette capacité à surmonter la Vie « naturelle » justement ? Il est devenu jusqu’ au boutiste dans son mode de vie maîtrisée et technicisée :
plus rien ne peut lui apparaître naturel car il est embué par un code de vie emprunté de matérialisme et dicté par la société de consommation ; « toxiqué » par des messages pour un grand nombre à caractère subliminaux issus de la publicité, l’ Homme devient ce qu’ on veut qu’ il soit, un être non pas perfectible, mais déjà parfait ; un être devenu déjà grand ( adulte ) sans avoir eu le temps d’ être petit ( enfant ), parce-que, un être de consommation et de production … il doit très tôt consommer pour produire, et produire pour consommer ; pour cela il doit avoir a priori les bonnes fonctions et la bonne programmation génétiques à la naissance pour pouvoir consommer et produire parfaitement, donc sans handicap, sans quoi le règne de la charge sociale pèse sur lui très vite car considéré peu rentable, voire inutile.
Nous avons décidément bien oublié dans cette société d’ Aimer en actes et en Vérité …
Mais pour qui se prend-t’ on ? Pour Dieu sans doute …
(Nathalie L.)
reproduit ici avec l'autorisation de Nathalie L.